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Récolte de semences

la Réserve Naturelle Régionale des marais et sablières du Massif de Saint-Thierry

Une banque de graines pour les espèces les plus menacées de la Réserve Naturelle...

Il y a quelques semaines nous étions sollicités par le Conservatoire Botanique National du Bassin Parisien ou (CBNBP) au sujet d'une demande de dérogation à l'article 2 du règlement, leur permettant de récolter des semences dans l’emprise de la RNR des Marais et Sablières du Massif de Saint-Thierry au cours des 3 prochaines années. La conservation (dont la récolte de semences), avec l'expertise, la connaissance et l'information, fait en effet partie des 4 missions dévolues par la loi aux Conservatoires Botaniques Nationaux.

Dans le cadre de son programme « Ensemble, prenons soin de notre avenir », Lancôme s'est engagé à soutenir un ambitieux projet de conservation porté par le Muséum national d'Histoire Naturelle et mis en œuvre par le Pôle Conservation du CBNBP. Ce projet comprend des volets complémentaires avec une campagne de collecte de semences des espèces les plus menacées de disparition sur le territoire d'agrément du CBNBP et plusieurs programmes de conservation d'espèces végétales en milieu naturel. Ainsi, au cours des trois années du partenariat (2021-2023), près de 200 espèces feront l'objet de collectes de semences qui seront ensuite placées en banque de semences pour une éventuelle utilisation future en cas d'effondrement des populations en milieu naturel. Les espèces à récolter seront les espèces inscrites dans la Liste Rouge Régionale de la flore menacée de Champagne-Ardenne (datant de mai 2018 et validée par le CSRPN en mars 2019) et présentant les statuts de menaces suivants : 

  •           CR : en danger critique d’extinction
  •           EN : en danger
  •           VU : vulnérable

 

Or, l'article 2 du règlement de la RNR mentionne :

"Il est interdit […] :

-          D’emporter en dehors de la réserve naturelle, mettre en vente, vendre ou acheter des végétaux non cultivés en provenance de la réserve naturelle quel que soit leur stade de développement ou des parties de ceux-ci.

Toutefois, des dérogations à ces interdictions peuvent être accordées, dans le respect des objectifs définis dans le plan de gestion de la réserve naturelle approuvé par la Conseil Régional, notamment à des fins scientifiques : 

-          Par le Préfet dans les conditions fixées par la réglementation en vigueur pour les espèces protégées au titre de l’article L.411-1 du Code de l’environnement ;

-          Par le Président du Conseil Régional après avis du comité consultatif de la réserve naturelle pour toutes les autres espèces végétales non cultivées. "

Cette demande a donc été présentée aux membres du comité consultatif pour avis. A cette occasion des échanges ont pu se tenir entre les membres du comité consultatif, la Région Grand Est, le CBNBP et le CENCA. Un avis positif a finalement été rendu à l'issu de ces discussions et une dérogation devrait être fournie dans les prochaines semaines au CBNBP par la Région Grand Est.

Finalement, en ce qui concerne les éventuelles espèces protégées, le CBNBP bénéficie d’un arrêté ministériel comme demandé dans le règlement de la RNR et chaque agent en charge des récoltes dispose d’une carte nominative d’autorisation.

Armérie des sables © CBNBP - Pascal Amblard

Pourquoi et comment ?

A la lecture de ces mots vous devez tout naturellement vous poser des questions sur ce programme de préservation "ex situ", ne faudrait-il pas en effet préférer une conservation "in situ" des espèces de la Réserve Naturelle ?

On peut dire que les deux approches sont complémentaires, d'un côté la conservation "ex situ" avec le prélèvements de semences peut permettre la création d'une banque de graines, disponible en cas d'éffondrement des populations ou si l'on souhaite renforcer une population existante. Nous avons perçu l'importance de ce type d'opération lorsque la seule population de Botryche Lunaire (Botrychium lunaria) présente sur le territoire de la Réserve Naturelle et même de l'ancienne Région Champagne-Ardenne, a été détruite par un barbecue sauvage. Depuis elle n'est plus présente et a définitivement disparue du site, c'est donc trop tard pour celle-ci mais nous espérons que la conservation de semences pourra profiter à d'autres.

Pour ce qui est de la conservation "in situ", le classement de sites naturels en Réserve a justement pour objectif de préserver les espèces et habitats naturels patrimoniaux. Le plan de gestion de la réserve est d'ailleurs en cours d'élaboration. Il liste des actions à mener pour préserver les différents sites. De même, le règlement stricte imposé par la Réserve et les opérations de police mises en place doivent aussi répondre à cette problématique de conservation.

On peut aussi se demander si ces opérations de récoltes ne pourraient pas avoir un effet négatif sur des populations déjà fragiles. Or, le CBNBP utilise un protocole très précis pour cette récolte des semences. Ce protocole s'appuie sur les effectifs présents de chaque espèce. Ainsi, le CBNBP ne prélève pas plus de 20% de semences pour les espèces les plus critiques. Par ailleurs, ces prélèvements ne sont pas faits tous les ans et les sites étant étudiés depuis de nombreuses années par le CENCA via des inventaires par maille, les effectifs de chaque taxon prélevé sont bien connus.

 

Semences d'Armérie des sables © CENCA - Séverine Goertz